Dans le cadre de la deuxième édition des rencontres photographiques de Douala (Repdoul), une conférence-débat s'est tenue ce 07 avril à l'IFC Douala sous le thème : « Les villes camerounaises en transition : urbanisme – écologie – art – santé ».
Dans un contexte urbain en constante mutation, Douala, capitale économique du Cameroun, se distingue de plus en plus par une dynamique artistique qui se mêle aux enjeux de l’urbanisme et de l’architecture. Loin d’être un ornement quelconque, l’art devient ici un acteur de transformation sociale, un outil de dialogue et un levier d'aménagement urbain. C’est ainsi que s’est tenue, le 07 avril 2025, à l’IFC de Douala, une conférence-débat portant sur le thème : « Les villes camerounaises en transition : urbanisme – écologie – art – santé ». Ce moment riche d'échanges a constitué un panel d'experts en architecture, écologie et des représentants de la communauté urbaine de Douala afin de ressortir l'impact de l'art dans la restructuration et la planification urbaine et architecturale des villes, en particulier celle de Douala. Cette exploration du temps et de l’espace urbain invite à une profonde réflexion sur l’évolution passée, présente et future des cités du Cameroun.
« Je pense qu’on a la possibilité de créer une atmosphère conviviale avec ce qu'on a pour voir la vie autrement et créer du plaisir d'habiter. Je ne suis pas idéaliste, mais pour l'avoir déjà fait, je sais qu'avec un petit rien on peut changer la vie des personnes », exprime la princesse Marilyn Douala Manga Bell, présidente du projet Doual'art. Dans une ville où l’urbanisation galopante est parfois synonyme de désordre, d’enclavement et de marginalisation, l’art redonne un visage humain aux infrastructures. Il crée des repères, suscite l’attention sur des lieux oubliés ou négligés et, surtout, il raconte des histoires. L’histoire d’un peuple, d’un quartier, d’une mémoire collective. « L’architecture va au-delà de la construction des murs, c’est l’art de créer un espace agréable à la vie, beau au regard. Dans ce sens, bien sûr, les artistes contribuent eux aussi à la construction d’un cadre de vie sain », affirme Caroline Barla, architecte.
Pour cette édition, les Repdoul mettent en lumière une thématique centrale : « Le temps qui passe : ma ville avant, maintenant et après », en résonance avec les défis contemporains auxquels font face les villes africaines en mutation. Les villes camerounaises, souvent confrontées à des défis d’urbanisation mal planifiée, peinent à intégrer les notions de beauté et de fonctionnalité dans leurs plans de développement. À Douala, l’introduction de l’art dans l’espace urbain vient bousculer cette réalité. Des projets comme le jardin sonore de Bonamouti ou la nouvelle Liberté de Joseph-Francis Sumégné incarnent cette volonté de faire de l’art un outil d’urbanisme participatif. Outre, l’on observe dans la ville le déploiement sur le terrain du projet Douala Clean City, le projet de drainage pluvial, etc. Ces projets initiés par la communauté urbaine de Douala (CUD) s’intègrent dans une réflexion sur la mobilité, l’environnement, l’inclusion sociale.Cependant, elles posent la question de ce que devrait être un espace public pour tous, dans une ville souvent marquée par des fractures sociales. Dans le quotidien des riverains de la cité économique, l’architecture improvisée, les constructions anarchiques et le manque d’espaces verts traduisent un urbanisme de survie selon les experts. Face à cela, l’art devient un contre-pouvoir doux. Il suggère d’autres possibles, d’autres formes de vivre-ensemble. « Il crée du lien là où il y avait séparation, il rend visible ce que l’on avait appris à ignorer », affirme Caroline Barla, architecte. En s’ancrant dans les problématiques concrètes telles que l’insalubrité, l’insécurité et l’exclusion, l’art urbain à Douala devient un plaidoyer visuel pour une ville plus juste, plus belle, plus vivable. L’enjeu pour les villes camerounaises est d’inscrire durablement cette approche dans les politiques publiques. « L’art est une composante de l’urbanisme moderne », a-t-elle poursuivi.Charles Totchum